| - Fanfiction 3 :
Se détester ?
Prologue
Je n’ai pas l’habitude que l’on vienne me voir avec ce genre de demande, aussi, je la fis répéter une fois de plus par mon client. Mon patient. Il me paraît charmant. Cela ne fait que deux minutes que je l’ai devant moi alors difficile de se faire une idée absolue de cet homme. Un milicien qui plus est. Comme pas mal de monde, je n’aime pas les voir parce que même si je n’ai rien fait, je me sens coupable. Je sais de quoi, pas de quelque chose que la loi pourrait me reprocher. Bref, je suis en train de me perdre dans mes pensées, ce n’est pas le moment.
A moi, Taivas Eriksson, on donne une mission. Je me sentirai presque milicien. Presque, il ne faut pas exagérer. Je dois suivre pendant trois nuits ce maître et son esclave pour m’assurer qu’ils pourront cohabiter ensemble sur le long terme.
Je m’interroge, quel esclave peut donner du fil à retordre à un milicien ? Je lis de nouveau le nom du vampire face à moi sur mon dossier : Christopher Weisstein. Par sa façon de se tenir, je suis sûr que c’est un haut gradé. Sa barbe est bien taillée bien que la longueur de sa chevelure brune m’ait surpris pour un homme de cette stature. Mais ça ne veut rien dire, je sais, je sais. Il est plutôt beau, son regard est franc, tout comme son sourire devant ma perplexité.
Il me confie une photo de son esclave, se lève et me serre la main en m’assurant qu’il m’enverra à chaque fois une heure en avance le lieu où ils seront pour mon enquête. Soit… J’avoue, cette expérience de terrain ne me fera pas de mal alors j’accepte définitivement l’aventure. J’espère juste qu’il n’aura pas l’idée de faire des choses… sexuelles. Mais bon, c’est signé, je n’ai plus qu’à faire avec.
La nuit finit son cycle, demain approche si vite. Je ne suis plus stressé, j’ai hâte d’assouvir ma curiosité et de comprendre pourquoi ce Christopher tient tant à cette observation objective. Mon impatience est grandissante et alors que je me prépare, je reçois enfin cet SMS tant attendu. Et c’est avec tout mon nécessaire que je m’y rends…
Chapitre 1 : Au café
Alors qu’il s’installait dans un coin du café pour ne pas être remarqué, Taivas demanda un café latte et un beignet tout en sortant son dossier. Il roula des épaules pour les détendre un peu avant de reprendre la photo de l’humain qu’il allait observer un peu. Prénom : Frêne. Nom : Lowhel. Pas plus d’informations pour le moment, comme si Christopher Weisstein avait voulu qu’il se fasse réellement une idée à partir de sa façon de concevoir le monde. Néanmoins, un esclave qui possédait un nom de famille, ce n’était pas rien, des plus surprenants même. Il retira enfin sa veste et contempla encore plus la photographie. Dessus, la chevelure rouge est saisissante, il se demande si ce sera encore le cas en vrai. Des oreilles en pointes, presque à la manière dont sont imaginer les elfes. Et une peau blanche comme même la sienne ne l’était pas. Donc pas entièrement humain. Taivas ne savait pas quoi en penser pour le moment. Il savait juste que le regard sur l’image le poignardait déjà. Alors le vrai…
Il releva la tête quand il entendit la porte du café s’ouvrir. Christopher avait l’air aussi ‘solaire’ que la veille. Son sourire était presque communicatif alors qu’il poussait une autre silhouette à pénétrer les lieux elle aussi. Clairement méfiante et peu encline à obéir, il était clair que c’était la force du vampire qui ne lui laissait pas le choix. La chevelure de feu cachait encore les traits de l’individu à Taivas qui se faisait tout de même déjà une meilleure idée de la situation. Il en était déjà persuadé : cet esclave n’avait aucune envie d’être esclave. Le milicien le salua d’un bref hochement de tête qu’il rendit à peine, plus préoccupé par son envie de contempler les traits de cet être. Ils finirent par arriver à une table pour deux à laquelle le roux s’installa presque brutalement. Son regard traîna sur les alentours avec une sorte de mépris et de dégoût mal déguisés.
« Je peux savoir ce qu’on fait là ? »
Même dans sa voix, la colère latente s’entendait. Taivas ne comprenait de fait vraiment pas à quoi jouer le milicien. Si cet esclave pouvait le tuer, sans nul doute qu’il le ferait dans la seconde avant de s’enfuir sans un regard en arrière. Pourtant, Christopher continua à sourire et tendit un menu à Frêne… Drôle de nom, d’ailleurs. Le blond se demandait vaguement comment un poisson pouvait avoir un nom d’arbre. En changeant une lettre, on aurait frêle. Mais cet esclave n’avait rien de frêle, au du moins il n’en aurait rien face à d’autres humains. Présentement, il n’avait aucune chance. Taivas nota ses premières observations sans les quitter des yeux, fasciné.
« J’ai pensé que nous pourrions passer un moment sympathique autour d’un bon café. Qu’en dis-tu ? Est-ce insurmontable ? »
Un reniflement agacé répondit au vampire brun qui sortit son paquet de cigarettes d’un geste nonchalant. Christopher s’appuya plus lourdement contre la chaise qui grinça, Taivas l’entendit clairement, puis alluma un de ses tubes de tabac. La fumée montait vers le plafond tandis que le regard de Frêne ne se détachait plus du menu. L’ayant lui-même consulté, le psychologue savait qu’il n’y avait pas grand-chose à y lire donc l’intention était bien d’envoyer paître le milicien qui reprit pourtant.
« Prend bien sûr ce qui te fait envie. Je suis celui qui paie ici. »
« Comme si j’aurais dépensé mon fric dans un truc aussi inutile qu’un café avec un vampire. »
« Tu me peines, je suis content d’être là avec toi, pour ma part. »
« Cause toujours. Un thé aux fruits rouges. »
Frêne eut un regard bien plus bienveillant pour l’humain serveur qui était venu demander leur commande. Pas encore sans animosité mais tout de même le début d’un désamorçage ? Taivas fut alors certain que c’était bien les vampires le problème. Et il parierait que Frêne leur en voulait pour sa captivité, au minimum. Et avec une telle véhémence qu’il n’y aurait rien à faire pour le faire changer d’avis. Alors à quoi servait tout ce décorum ? Toujours aussi intrigué, le blond baissa cette fois le regard quand le roux observa de nouveau autour de lui. A la recherche d’une issue ? Peu probable. D’un allié ? Possible… Mais si un tel individu en venait à être présent, Christopher le saurait immédiatement. Ce n’était pas un milicien de la dernière pluie, encore plus alors qu’il se retrouverait avec un esclave aussi haineux dans les pattes.
Il y eut alors entre eux un long silence et plus il s’étirait, plus le roux semblait nerveux. Ses battements de cœur se faisaient de plus en plus irréguliers comme s’il s’entendait au pire. Ils s’accentuèrent quand Christopher sortit un dossier, poussant l’intérêt de Taivas à son comble. Qu’est-ce qu’il y avait là-dedans ? Des informations sur la famille, les amis de Frêne ? Des photographies ? Des rapports de décès ? Le blond regrettait de ne pas être plus près alors que le milicien faisait durer le suspense. Clairement intenable pour le roux qui mit un revers dans ledit dossier. Des feuilles s’éparpillèrent sur le sol.
« Arrêtez ça ! Vous n’aurez plus rien de moi sinon des coups de pieds au cul ! »
« Tu me ferais à peine sursauter, tu sais ? »
« Connard. »
« Allons, reste poli, nous sommes des gens civilisés. En plus, ce dossier ne te concerne pas. »
« Donc en plus, vous jouez avec mes nerfs ! »
« Tu ne veux pas parler, alors je fais autre chose, tout simplement. Je ne suis pas ton ennemi, Frêne. »
Le roux eut alors un rire indécent, un rire fort, presque forcé, pas du tout rempli d’allégresse. Taivas en eut un frisson. Christopher s’y prenait mal. Mais y avait-il une bonne manière de s’y prendre ? Non. Le plus étrange, c’était que son rire rendait Frêne encore plus beau et effrayant dans sa beauté. Dérangeant. Qu’est-ce que les vampires lui avaient fait ? Taivas n’avait pas tellement envie de l’imaginer mais il y serait sans doute amené.
Avant que le serveur ne le fasse, Christopher se leva pour ramasser les feuilles noircies d’une écriture cursive et il se rassit en rassurant l’humain qui déposa donc leurs boissons et une part de brownie pour le vampire avant de filer, aussi peu rassuré que Frêne semblait confiant dans le fait d’être une tête brûlée.
« Non, tu es juste en train de me prendre la tête. Tu sais quoi, monsieur le milicien, va te faire voir. Monte sur une table et déclare ton amour et on verra si j’ai envie de te parler vraiment. »
Taivas sut à l’instant où Frêne eut fini que Christopher allait le faire. Le blond eut envie de se passer une main sur le visage mais ça aurait pu le griller. Il n’était pas censé les écouter mais le milicien allait agir de manière tellement stupide qu’il ne put s’empêcher de soupirer d’avance avec un sourire amusé qu’il cacha en buvant de son latte. Du coin de l’œil, il vit le vampire brun se lever après avoir écrasé sa cigarette à moitié fumée. Il releva la tête pour suivre le reste en tentant de garder un visage des plus neutres possible.
Bien sûr, pour ne pas faire cela de façon banale, Christopher sauta sur la table proche de la leur et s’inclina vers Frêne qui donnait l’impression de vouloir le tuer encore plus. Et non sans une bonne dose de souffrance auparavant. Le milicien se redressa et repoussa ses cheveux d’un geste vers l’arrière. Sa main gauche sur le cœur, l’autre maintenant tendu vers le roux à l’air assassin, il toussota comme accorder ses cordes vocales au moment qui allait suivre. Taivas ne put s’empêcher d’écrire ‘a besoin de vacances’ sur la colonne concernant le gradé brun qui commença à déclamer :
« Frêne… Ta chevelure gluante… Non, ce n’est pas ça… Hum… Ta chevelure renversante m’a tapé dans l’œil à l’instant même de notre rencontre. Il faut dire que tu venais de te détourner pour te mettre en courant et que j’ai effectivement eu de tes cheveux sur la rétine. Ça fait un mal de chien. Bref... »
Taivas se concentrait. Il savait qu’il ne fallait pas rire. Non surtout pas. Pas avec un esclave qui serrait les poings de toutes ses forces. Le blond était surpris que le roux ne soit pas déjà debout et parti. Etait-il curieux d’entendre la suite des fadaises ?
« Tu es comme ce futur soleil rouge qui s’éteindra sur notre belle planète et qui y rendra la vie impossible même pour les vampires. Tu es comme une arme fatale… Non, attend, ça c’est redondant, une arme est faite pour tuer donc pour être fatale. »
Taivas se permit cette main sur le visage. Ça devenait n’importe quoi.
« Tu brilles comme une étoile de mer alors que tu es un guppy tropical de toute beauté dans notre sinistre climat de pays froid. Tu réchauffes à coups de mots cinglants, plus vif qu’un fouet, plus délié qu’une corde de soie ! Tu m’entoures de ta haine pour mieux abriter mon amour pour toi. »
Le psychologue ajouta ‘énormément’ en lettres capitales devant le ‘besoin de vacances’ tandis que l’esclave se levait et balançait son thé au visage de Christopher. Il le ratait à cause de la distance mais la chemise bleue du milicien lui colla donc à la peau alors que celui-ci reprenait de plus belle.
« Tu me réchauffes même de ton thé ! »
« Descend, je vais te réchauffer avec des baffes aussi ! »
Frêne ne criait pas encore mais Taivas sentait que ça allait venir. Christopher fit l’homme étonné et s’agenouilla sur la table pour prendre l’une des mains du roux entre les siennes.
« Quelle merveille tu fais, tu veux même user de tes doigts délicats sur ma peau pour t’assurer que je ne mourrais pas de froid. Tu vois, tu es vraiment l’être que j’atte... »
Taivas grimaça quand le milicien se prit son café bien en pleine face cette fois. Il distingua dans un coin de la salle le serveur qui ne savait absolument pas quoi faire face à cette situation inédite. Lui-même restait dans l’expectative. Et puis, il était psychologue, il n’était pas là pour se prendre des coups à la place du brun. Il ne le prenait pas pour fou mais il ne voyait définitivement pas où le vampire voulait en venir avec cette mise en scène absurde et quelque peu insultante. Serait-il exaspéré de ne pas pouvoir parler deux minutes pleines avec le roux sans que ça ne tourne mal ? Peut-être bien. Il ferma les yeux quand il vit que Frêne allait abattre le verre sur le crâne de l’homme, réflexe stupide. Il rouvrit un œil pour le voir maîtriser. Et là commença la pluie d’injures. Sauf que l’esclave ne s’arrêtait pas là, il était inventif.
« Espèce d’hippopotame grotesque et bruyant ! Sale ursidé bon pour être un tapis ! Je ne m’essuierai même pas les pieds sur ta tête tellement tu me fais horreur ! Abruti de vampire bienheureux d’en être un ! Tu sais où tu peux te la carrer ta condition de maître du monde ! Dans l’arrière train de ton premier ancêtre ! Et tu peux enfoncer ta fausse dignité et ta joie de vivre avec ! »
Frêne se débattait maintenant pour être libéré tout en poursuivant ses incriminations qui devenaient particulièrement colorées. La tasse tomba au sol et se brisa, l’odeur du sang monta alors que le roux venait sûrement de se faire entailler la cheville ou le mollet par un débris volant. Toujours mouillé, Christopher descendit alors de son perchoir et souleva l’esclave pour l’y installer à sa place avant de soulever sa jambe, le tout dans un laps de temps trop court pour que Frêne puisse comprendre sa nouvelle position. La contemplant finalement, il resta silencieux alors que le milicien passait sa langue sur la petite plaie qui se referma en quelques secondes. Et Taivas grimaça une nouvelle fois mais plus pour le roux que pour le brun alors que le premier abattait son poing sur la tête du deuxième. Un gémissement de douleur se fit entendre alors que Frêne ramenait sa main à son torse, regrettant assurément son acte impulsif.
« Lâche moi espèce de sale pervers ! »
« Voilà, voilà. Et en plus, tu me donnes du sang. Ah, Frêne, il manque juste le câlin. »
Le roux se retint de justesse de tenter d’assommer encore une fois Christopher qui souriait de toutes ses dents. Mais son sourire n’atteignait pas ses yeux. Taivas ne sut comprendre ce que voulait dire exactement ce regard. Il s’était attendu à ce que la litanie d’insultes reprenne mais Frêne se redressa, prenant un air presque royal, méprisant le vampire par cette seule action. Christopher soupira alors et recula pour permettre à Frêne de descendre de son perchoir. Il avait un bel air le milicien, il allait devoir se changer. Taivas n’oserait pas sortir d’un café dans cet état de son côté. Le voir se rasseoir pour manger son brownie finit d’ajouter une autre couche d’absurde au moment. Taivas en avait presque mal à la tête alors que Frêne se rasseyait sur son siège à son tour en frottant sa main sous la table.
« Tu es fou, milicien. »
« Fou de toi, beau guppy. »
« Si tu penses que je vais te croire… Ce serait moi le fou de le faire ne serait-ce qu’une seconde. »
« Et dire qu’il est écrit dans ton dossier que tu es naïf. »
« Pas à ce sujet, sale cadavre ambulant. »
Christopher prit alors un air plus sérieux sans pourtant avoir l’air de se sentir insulté. Il semblait que tout lui ait glissé dessus et Taivas trouvait que c’était une bonne chose pour un milicien de ne pas se laisser atteindre par les injures. Il le nota. Comme il nota inutilement que le vampire avait de mauvaises manières à se lécher les doigts de la sorte. L’agacement revint de plus belle dans le regard rouge de Frêne. Il resserra sa veste autour de lui, comme s’il attendait le coup de grâce, ce qu’il était vraiment censé entendre ce jour-là, dans ce café. Mais rien ne vint sinon un :
« Je vais devoir expliquer mon retard à mes collègues. Tu pourras rire de moi avec eux. »
Le rictus du roux fit penser à Taivas que ça n’allait pas arriver. Quelques minutes plus tard, ils étaient partis, Christopher ayant laissé un gros billet pour rembourser la tasse ainsi que le désagrément sans doute. Le serveur commença à nettoyer, jetant encore des coups d’œil craintif vers la porte.
Jour d’observation 1
Le jeu est dangereux et m’apparaît comme inutile. Il n’y a aucune chance que Frêne baisse les armes, même si ça devait le tuer. Les méthodes de Christopher sont déconcertantes, mais amènent toujours une réponse violente de la part de Frêne, preuve encore que celui-ci n’est pas dupe même si selon Christopher, il est naïf. Frêne a sans doute connu trop de choses pour se permettre de l’être encore.
Mais quelles sont ces choses ? Sans son dossier, je ne peux que supputer et cela ne me donne aucune réponse réelle. Cependant, je suis sûr que Frêne est important ou a été important pour les libres. Il a dû en faire partie à un moment ou un autre et continue de revendiquer à sa manière cette appartenance. L’hypnose est clairement le seul moyen de le faire parler, cependant ce ne serait pas sans contrecoup sur la psyché ensuite. Même si la trahison serait contre son gré, elle serait réelle et Frêne pourrait alors arriver à des moyens inconcevables pour faire payer cela.
Est-ce la raison de la conduite de Christopher ? Veut-il que Frêne trahisse sans retour de bâton ?
Tout cela me laisse perplexe mais j’ai hâte de voir la suite de leur étrange promiscuité.
Taivas Eriksson.
Chapitre 2 : Au supermarché
Quand le deuxième SMS arriva, Taivas quittait à peine la salle de sport. Les sourcils froncés, il nota qu’il avait à peine le temps d’aller se doucher avant de retrouver les deux personnes qu’il se devait de filer. Aussi, il fit au plus vite et bientôt, il se retrouva dans un endroit qu’il haïssait, le centre commercial. Le blond préférait les épiceries de quartier, les étals de fruits et légumes, pas… Pas ça. Pour lui, ce lieu n’était que décadence, prouvant que tout s’achetait et se vendait pourvu qu’on y mette le prix. En dehors de sa zone de confort, il faillit ne pas les voir entrer. Il les suivit avec son petit panier à roulettes qu’il ferait semblant de remplir. Il voulait surtout voir la suite de l’aventure.
Si Christopher avait à peine enfilé une veste en cuir noir sur son débardeur blanc pour se protéger du froid, on devinait sans mal que Frêne était encore une fois couvert de plusieurs couches d’habits pour se protéger du vent. Et même une fois à l’intérieur, il ne fit rien pour ouvrir son manteau noir, les mains dans ses poches. Sa chevelure cachait encore en partie un côté de son visage, mais l’autre laissait voir toute l’horreur d’être entouré d’autant de vampires. Taivas se demanda vaguement ce qu’il ferait en premier. Tuer ou fuir ? Bien que les deux ne sont pas incompatibles en vérité. Christopher s’était lui aussi saisi d’un panier et prit Frêne par le bras. Le roux tenta aussitôt de s’extraire de cette étreinte sans doute malvenue pour lui mais le brun ne l’entendait pas du tout de cette oreille. Sans pour autant être brutal, ce qui rassurait Taivas.
Pas qu’il pensait que la douceur pourrait faire plier le roux. Ou en tout cas, pas maintenant.
Les premiers rayons se firent dans un très grand silence entre les deux, Christopher saluant parfois certaines personnes dans la foule. Comme le vampire semblait sociable, cela ne surprenait pas Taivas. La Milice se devait d’avoir prête à aider de toute façon, non ? Ils passèrent donc les rayons de nourritures pour animaux, de produits vaisselle et lessive pour rejoindre les étagères consacrées aux soins du corps. Le blond supposait vaguement qu’il était donc venu pour Frêne mais il ne pouvait avoir de certitudes là encore. La suite le dirait. Il fit semblant de vérifier les mousses à raser quand le regard du roux se posa sur lui, tout aussi furieux que pour les autres vampires. Et il tendit l’oreille alors que Christopher fredonnait :
« Alors, shampooing pour guppy… Y’a pas ! »
« Sans blague. Vous en avez d’autres comme ça, peut-être que je vais rire. »
Taivas dut se mordiller la lèvre inférieure pour ne pas rire. Malgré lui, il adorait les échanges entre ces deux-là, bien qu’ils ne soient pas du tout exempts de sentiments négatifs d’un côté.
« Vous voulez vraiment acheter un shampooing spécial pour mes cheveux ? »
« Bien sûr. Ils sont tellement beaux quand je les prends dans la rétine, ce serait dommage qu’ils deviennent ternes. »
Encore ça. Taivas secoua un peu la tête et reposa la mousse à raser pour faire semblant maintenant de s’occuper des déodorants. Se rapprochant ainsi un peu d’eux. Christopher continuait de soigneusement passer le rayon au crible, proposant plusieurs flacons à Frêne qui les reposait aussitôt comme s’il ne voulait rien de ce qu’aurait pu toucher le milicien. Taivas ne serait pas surpris que ce soit une chose comme celle-là. Et plus Christopher en proposait, plus le roux les remettait en place avec un calme qui annonçait une tempête tropicale. Finalement, le brun en mit deux dans le panier et il reprit la route avec son compagnon récalcitrant. Le blond attendit quelques secondes avant de les suivre, presque persuadé tout de même d’avoir été grillé. Cependant, la curiosité était trop forte pour qu’il s’abstienne.
Les débats continuèrent tout le long mais ce fut au rayon fruits et légumes qu’ils connurent leur apothéose. Jusque-là, Frêne avait réellement rongé son frein, donnant presque l’impression qu’il se fichait des regards inquisiteurs et moqueurs des vampires alentour. Mais sa patience devrait être usée et très sincèrement, Taivas pouvait le comprendre. Cela débuta par des sortes de petites taquineries, comme Christopher en faisait depuis qu’ils étaient entrés.
« Regarde ses fraises ! Ah non, elles n’ont pas encore la bonne nuance… Peut-être que ses tomates... »
La phrase fut coupée par l’action de l’esclave. Qui prit ladite tomate des mains de Christopher pour bien l’écraser contre le visage du milicien. Taivas retint une grimace, ça allait aussi mal tourner qu’au café. Il fit semblant de regarder des aubergines.
« Tu penses qu’un soin à la pulpe de tomates me donnera un meilleur teint ? Frêne, je ne pensais pas que tu me voulais aussi beau que toi. »
« Je vous voudrais aussi écraser que ce fruit mûr pour ne plus jamais entendre votre voix de crétin. »
Tout le mépris de Frêne rejaillissait, poussant quelques vampires curieux à s’arrêter pour contempler la scène. Un agent de la sécurité lui-même s’approcha, comme si Christopher serait incapable de neutraliser en moins de deux le roux. Sa taille ne faisait pas tout, le guppy n’aurait aucune chance. Du coin de l’œil, Taivas vit le brun s’essuyait le visage et se lécher les lèvres, toujours tout sourire. Le blond se demanda combien Frêne paierait pour voir ce fameux rictus disparaître.
« Si c’est toi qui me fais souffrir, je suis d’accord, mon amour. »
« Ne m’appelez pas comme ça, vampire dégénéré ! »
« Monsieur... », dit l’agent, pas sûr. « Puis-je vous aider ? »
Christopher agita sa main humide de tomate dans un geste nonchalant, ses yeux toujours sur Frêne.
« C’est absolument inutile, je gère très bien la situation. Mon chéri a quelques soucis d’estomac, ça le rend de mauvaise humeur. »
Le garde semblait penser que Christopher était fou mais quand celui-ci lui montra sa plaque, il reprit un air plus assuré en reculant tout de même d’un pas. Puis il demanda à la foule de circuler pour que les gens puissent reprendre leurs achats. Toujours face-à-face, presque comme deux cow-boys dans le Far West, Frêne et Christopher se regardaient, au premier qui ferait un faux pas. Le roux récupéra une autre tomate d’un geste lent, presque trop. Taivas devinait sans mal la suite, l’esclave avait dans l’idée de lapider le milicien à coup de fruits. Pas que cela lui ferait mal mais le blond s’interrogeait réellement : est-ce que Christopher aimait se faire humilier ? Si oui, fallait-il vraiment que ce soit en public ? Parce que le psychologue était tout de même gêné pour lui.
« Tu devrais la reposer, ce n’est pas bien de gaspiller la nourriture. »
« Dit un vampire qui doit déjà avoir tué de la nourriture... »
« Peut-être, peut-être pas. L’on ne choisit pas toujours comment sauvegarder la bouffe, tu sais. Je fais de mon mieux mais quand elle est récalcitrante... »
« Comme moi ! »
« On finit toujours par en mettre partout. Mais ce n’est pas voulu. En tout cas pour ma part. »
« Mais bien sûr... »
Frêne serrait de plus en plus la tomate, elle avait déjà en partie éclaté. Taivas voyait le jus couler le long de ses doigts blancs pour rejoindre le carrelage crème du supermarché. Il reposa les aubergines, prit un sac de poivrons, au cas où le roux se tournerait vers lui. Il serait tout de même un très mauvais espion, il s’en rendait compte.
« Donc, tu veux bien être mon repas de ce soir, Frêne ? »
« Dans tes rêves les plus doux et mes cauchemars les plus noirs. »
Christopher se saisit alors rapidement de la main de l’esclave, obligé de lever les yeux néanmoins pour se confronter à son visage. Taivas serait bien à faire pareil s’il devait parler au roux. Le milicien retira le fruit usé de la poigne du guppy pour ensuite soulever ce membre. Les doigts mouillés finirent près des lèvres du brun avant que Frêne ne réagisse et essaie de se dégager de son emprise.
« Mais qu’est-ce que vous croyez faire ?! »
« Il faut bien que je nettoie mon bel esclave, non ? »
« Espèce de timbré ! Lâchez-moi où je hurle ! »
« Tu le fais déjà un peu. Je sais que je suis doué, mais j’ai à peine commencé, tu sais. »
Et là, encore une fois, si un regard pouvait tuer, le regard de Frêne l’aurait fait. Taivas en eut un large frisson tout le long du dos, complètement perplexe et perdu par les agissements de Christopher. Il donnait l’impression qu’il existait juste pour faire enrager le roux. Était-ce pour prouver une sorte de supériorité ? Le blond avait du mal à y croire, le milicien ne semblait pas être fait de ce bois même si clairement, il devait adorer sa carrière pour être encore dans le camp des forces armées des vampires. Frêne chercha encore à se dégager mais sa résistance était futile. Et au moment où il était clair que l’esclave allait tenter le coup de pied, Christopher le lâcha et dit :
« Bon, puisque tu ne veux pas de soupe de tomates, nous allons commander pour ce soir. Je m’en voudrais que tu meures de faim. En route. »
Poussant clairement Frêne vers les caisses avant qu’il ne commette un vrai scandale. Taivas laissa les poivrons et bien conscient qu’il devait tout de même acheter quelque chose, il prit deux sacs de fruits secs et finit bien derrière eux pour le paiement. Tout autour, on chuchotait sur eux, justement, comme Christopher se sécha à peine le visage avec un mouchoir en papier. Frêne continuait ses regards assassins mais sans rien tenter de plus, comme s’il savait que cela pourrait l’amener à se faire lyncher. Pourtant, Taivas ne pensait pas que le brun laisserait quelqu’un s’attaquer physiquement à son… prisonnier. Le blond ne pouvait penser que le mot était erroné.
« C’était pour me montrer encore une fois que je suis dépendant de vous tant que je suis ici ? »
Le psychologue fut étonné que Frêne mette les pieds dans le plat si brutalement après un long silence mortifère. Christopher sortit son paquet de cigarettes pour en vérifier le contenu et en prit deux qu’il mit sur le tapis roulant. Il rajouta à cela un paquet de chewing-gum à la cerise, bien rouge, comme une énième provocation.
« Tu dépends de moi, vraiment ? »
« Je ne peux pas vous échapper en tout cas. »
« Disons que je ne suis pas facile à semer, c’est vrai. »
Frêne serra les poings.
« Un jour, je retournerai où j’étais et je pousserai de nouveau les esclaves à chercher la liberté en vous détruisant tous. »
« Es-tu sûr que tu devrais dire ce genre de choses entouré de vampires ? »
Le roux sembla alors se rappeler où il était. Les habitudes des vampires alentour avaient changé pour la plupart, comme clairement prêts à tuer ce qu’ils appelleraient sans doute un beau parleur. Ou un esclave fou. La beauté du guppy ne le sauverait pas de ces possibles assassins. Taivas espérait juste que si ça devait arriver un jour, que ce soit rapide et quasiment sans douleur. Mais il y avait peu de chances, bien des siens étaient plutôt rancuniers. Un esclave, même s’il n’appartenait pas à tous était vu comme un traître à tous s’il arriverait à s’en prendre à l’un des leurs.
Frêne était donc un peu suicidaire sans le vouloir.
« Ton impétuosité te fera tuer un jour. »
Le roux retint très clairement une réplique brûlante de haine. Il se tourna vers le caissier humain qui scannait leurs articles sans les regarder, probablement apeuré par la scène. Partout où ils passaient, ces deux-là finissaient par effrayer quelqu’un qu’ils le veuillent ou non. Taivas en eut presque un sourire de dépit mais il se contint. Christopher continuait de jouer avec son paquet de cigarettes, en manque sûrement.
« Tu sais, si tu te laissais aller, tu pourrais vivre une assez bonne vie avec moi. »
« Je ne suis pas... »
Un esclave. Pas besoin que Frêne finisse sa phrase pour qu’ils sachent tous ce qu’il avait eu l’intention de dire. Vraiment trop conscient de sa vulnérabilité maintenant, le roux rangea ses mains dans les poches de son manteau noir et serra les lèvres. Et les dents avec. A l’avis de Taivas, Christopher ne saurait plus lui tirer un mot pour le moment. Et cela valait mieux à l’humble avis du psychologue. L’humain leur annonça le montant de leurs courses d’une voix un peu bredouillante, le milicien sortit sa carte de crédit et paya tout en rangeant les achats comme Frêne n’était pas décidé à aider. Le sac dans une main avec sa cigarette, la main libre de Christopher vint se caler dans le dos de l’esclave pour l’entraîner avec lui.
Les regardant s’éloigner, Taivas sursauta presque quand le caissier lui annonça son propre total à payer. Il le fit rapidement et prit ses articles pour allonger le pas ensuite, dans l’idée de rattraper le ‘couple’. Ils étaient à la plus proche sortie du centre commercial et le blond était lui-même heureux de pouvoir sortir de là. Le vent fit s’agiter ses mèches blondes dans tous les sens alors qu’il captait difficilement une réplique de Frêne.
« Et si j’étais mort, là, qu’auriez-vous fait ? »
« Comme si cela aurait pu arriver. Donne-moi donc plus de crédit, mon chéri. »
Et Taivas les observa partir, ses oreilles captant un dernier petit rire de Christopher Weisstein.
Jour d’observation 2
En fait, Christopher essaie réellement d’intégrer Frêne à notre monde. Cependant, je continue de penser que sa façon de faire est malhabile. La dérision qu’il emploie en permanence aiguise les nerfs de Frêne qui finit donc par lui répondre de manière cruelle.
En réalité, une entente est possible, encore faudrait-il que Christopher cesse son petit manège. Il a supposé que prendre la situation au sérieux ne ferait qu’empêcher le dialogue mais peut-on dire qu’il y a là un vrai dialogue entre eux.
Personnellement, je ne vois pas une menace de mort ainsi.
Frêne semble se rendre compte néanmoins de la protection que lui offre Christopher. Même s’il n’en veut pas, il est bien obligé de l’exploiter. La relation est déséquilibrée mais une relation maître-esclave n’est jamais d’égal à égal. Frêne peut-il se réconcilier avec cela ? J’en doute…
Taivas Eriksson
Chapitre 3 : Au cours d’un problème…
Taivas avait dû sortir une chemise un peu plus belle que celle de d’habitude. Pour le troisième et dernier soir d’observation, de ce qu’avait laissé comme indication Christopher dans le SMS, ils seraient dans un restaurant. Normalement, de fait, Taivas n’aurait pas trop de mal à se cacher. Mais bon, il était tout de même certain que si Frêne le voyait, le roux comprendrait qu’il se passait quelque chose. Soupirant, le psychologue réfléchissait donc à une manière de rester dans l’ombre pour terminer cette drôle d’enquête. Lissant le tissu qui recouvrait son torse, il se regarda dans le miroir. Si seulement ses cheveux faisaient ce qu’on leur disait, peut-être qu’il saurait plus facilement se dissimuler. Il passa une main dedans et secoua la tête. Inutile de pleurer sur ses pics, il était temps d’y aller. Il ferma donc le cabinet et il vérifia l’adresse du restaurant pour en prendre le chemin.
Sauf qu’il entendit ses cibles bien avant, dans une ruelle noire et sale. L’obscurité y était forte, comme si elle pouvait mener au sous-sol de la ville. Il perçut un faible gémissement de la part de Frêne, l’odeur du sang. Soit celui-ci s’était blessé seul, soit on l’y avait aidé. Et le blond était certain que ce n’était pas Christopher qui l’avait fait. Ça n’aurait pas beaucoup de sens. Était-il même là parce qu’il n’entendait que le roux en vérité. Une respiration un peu sifflante, un peu comme s’il tentait de s’en abstenir parce qu’il avait mal aux côtes. Après une bonne dose d’hésitation, il pénétra à son tour dans l’espace étroit, laissant sa vision nocturne se mettre au travail.
Taivas trouva enfin Frêne au sol, une main sur le côté et l’odeur du sang qui continuait à s’infiltrer dans ses narines. D’une voix irritée et douloureuse, l’esclave prit la parole.
« Je ne vous conseille pas de me mordre... Vous auriez de sérieux soucis avec la milice... »
Le blond retint un sourire en entendant ça. Que le roux joue sur le fait qu’il soit protégé paraissait étrange mais dans le même temps, qui n’utiliserait pas toutes ses cartes pour survivre ? Il fronça les sourcils, un peu incertain du coup sur la question.
« Je ne veux pas vous mordre, je vous ai entendu gémir de douleur. Voulez-vous que je vous emmène à l’hôpital ? »
« Touchez-moi et je vous crève... »
Ah, déjà bien plus en adéquation avec le personnage. Le psychologue chercha le milicien des yeux, vraiment étonné qu’il ne soit pas là. Ça n’avait pas de sens, il n’aurait normalement pas abandonné son ‘chéri’ dans une ruelle puante en train de saigner. Il était peut-être à la poursuite de ceux qui les avaient attaqués. Taivas s’agenouilla à côté du roux sans chercher à le toucher, s’efforçant à complètement occulter l’odeur du sang. Il essayait de deviner où l’esclave était vraiment blessé mais difficile de le deviner avec son manteau noir. Il se lécha les lèvres malgré lui, tenant ses mains contre son ventre pour ne pas toucher.
« Je vais rester avec vous alors… Quelqu’un va venir vous chercher ? »
Faire comme s’il ne savait pas. C’était un peu étrange mais il avait son propre rôle à tenir dans cette histoire. Et malgré l’odeur du sang, des tas de questions se bousculaient dans son crâne. Il avait tellement envie de les poser.
« Il a intérêt… Sinon, il ne saura jamais ce que je sais. »
« Ce que vous savez ? »
« N’essayez même pas. Si je ne parle pas à la Milice, ce n’est pas pour parler à un péquenaud. »
Taivas ne prit pas mal l’insulte. Pour avoir entendu Frêne, celle-là était à peine une grossièreté. Il tendit l’oreille pour tenter de savoir si Christopher revenait mais ça ne semblait pas encore être le cas. Il se rendit alors compte que la blessure était à la tempe parce que des cheveux de Frêne y collaient. Pour le restaurant, c’était fichu. Bien qu’en y repensant, Christopher avait en plus choisi un établissement un peu romantique. Le blond aurait eu l’air d’un abruti tout seul parmi tous les couples. Donc, peut-être qu’il devrait remercier pour cette attaque inattendue. Il sentit son estomac se serrer un peu, la faim commençant à le tenailler légèrement. Il tourna la tête en entendant du bruit derrière lui, des vampires qui passaient et qui poursuivaient leur route, heureusement pour lui. Il n’avait aucune envie de se battre. Et puis d’un coup, une sensation de malaise et il s’écarta vivement de Frêne.
A moitié levé, il vit que le roux avait trouvé une barre de fer qu’il tenait de sa main libre, avec laquelle il venait de le menacer. Enfin, ça n’aurait pas été qu’une menace s’il n’avait pas senti l’attaque venir. Reculant encore d’un pas, Taivas n’était pas réellement surpris que Frêne s’en prenne à lui mais qu’il n’ait pas remarqué plus tôt l’arme. Il avait agi comme un vrai amateur.
« Je ne vais pas vous mordre, j’attends juste avec vous. »
« Mais bien sûr… Quand est-ce qu’un vampire ne se sert pas ? »
« Eh bien quand il n’a pas envie d’être puni par la loi ? Et puis, j’ai des manières, merci. »
Taivas tendit de nouveau l’oreille, cette fois, quelqu’un était entré dans la ruelle. Il reconnut finalement Christopher qui parut surpris de le voir avant de sourire de toutes ses dents. Le brun avait l’air un brin débraillé mais très content de lui. Il dégagea la barre de fer de la main de Frêne d’un coup de pied avant de s’agenouiller près du roux.
« Ah, mon chéri n’est pas mort. J’ai rattrapé ton pote, il est en ce moment même en train de voir mes collègues. »
« Espèce de... »
« Shhhh, tu es blessé, tu ne devrais pas te fatiguer. Alors qu’est-ce que tu as ? Bobo à la tempe… Bobo aux côtes ? »
Christopher appuya dessus, faisant siffler Frêne de douleur.
« Hum, du pas joli tout ça. Prêt à boire de mon sang ? »
« Prêt à t’enfoncer un pieu dans le ventre, connard. »
« Allons, qu’avons-nous dit sur les insultes ? En plus, ça doit être juste un bleu, tu te montres un peu douillet, mon grand. »
A la non-surprise de Taivas, d’autres insultes fusèrent alors que Christopher se mordait le poignet. Bloquant la tête du roux, le brun mit sa plaie contre la bouche de celui-ci, l’obligeant à boire un peu de son sang. Même si l’échange n’avait rien d’intime, le blond se sentit étrangement de trop. Il nota néanmoins que Frêne ne se débattit pas plus, sans doute conscient qu’il ne réussirait pas à contrer le milicien déterminé. La suite donna encore plus l’impression au psychologue qu’il ne devrait pas être présent puisque Christopher alla lécher la tempe de Frêne qui tentait de le repousser vainement.
« Sale pervers… Arrête ! Arrête ! »
« Vous devriez peut-être quand même l’emmener à l’hôpital, non ? »
Taivas se sentait obligé d’intervenir, au moins pour tenter d’évacuer le malaise qu’il sentait naître en lui. Christopher se redressa tout en soulevant le roux sans difficulté bien entendu. Frêne fit une grimace mais rien de plus pour bien cacher sa douleur. Il se débattit un peu mais ses côtes semblèrent le pousser à vite se calmer. Taivas pencha la tête, Christopher répondit enfin :
« Je ne pense vraiment pas que ce soit nécessaire. Et puis, c’est un peu de sa faute. Ses amis doivent penser qu’il les a trahis. »
« Jamais. Je ne te dirai rien. »
« Tu sais, à force de le répéter, tu vas ressembler à un disque rayé, mon cœur. »
Frêne donna un coup de poing mais évidemment, il n’eut pas grand effet sur le milicien qui se dirigea vers la sortie de la ruelle. Taivas les suivit après un dernier regard sur les lieux. Il pinça les lèvres mais il n’allait pas insister. Ça ne serait que parler dans le vent, il n’était en aucun cas décisionnaire pour les soins à apporter à l’esclave. Il resta dans l’ombre alors que Christopher permettait enfin à Frêne de remettre les pieds sur le plancher des vaches.
« Tant pis pour le restaurant, tu ne le mérites pas. »
« Donc je crève la dalle, ce soir ? »
« Tu pourrais parler mieux que ça. Vraiment, tu vas finir par me rendre triste. »
« J’y croirai quand je ne verrais plus ce sourire de niais sur votre face. »
Taivas leva presque les yeux au ciel. Tout ceci ressemblait presque à un dialogue de sourds. Ou au concours duquel pisserait le plus loin. Difficile d’être fixé tant ça ressemblait aussi presque à un jeu entre ces deux-là. Mais la haine de Frêne était bien trop réelle. Le blond profitait de la brise glaciale pour tout de même se nettoyer les poumons de l’odeur du sang. Content de ne pas avoir craqué. Il regrettait tout de même que ça n’aille pas jusqu’au restaurant. Parce qu’il avait l’impression de passer à côté de quelque chose qui devrait lui paraître évident.
« Je vous remercie d’avoir surveillé mon esclave, monsieur. »
Taivas revint à la réalité en entendant cela, regarda Christopher.
« Je vous en prie, prenez bien soin de lui. »
« Merci de ne pas parler de moi comme si je n’étais pas là. » Frêne le tuait des yeux. « Sans vous, j’aurais pu m’échapper. »
« J’en doute sérieusement. Après tout, si votre maître vous a laissé, c’était qu’il savait qu’il pourrait vous retrouver là où il vous avait planté. »
Il n’y avait aucune méchanceté dans la voix de Taivas, il ne faisait que constater. Le regard du roux s’intensifia, comme si le simple fait que le blond existe était une insulte en soi. Il se retint de lever les mains en signe d’apaisement, ce serait inutile et se dit qu’il pouvait retourner à son cabinet. Ces deux-là n’avaient pas ou plus besoin de lui et comme il était grillé, sa phase d’observation ne servirait à rien. Aussi, il les salua et commença à s’éloigner tandis que Frêne marmonnait des imprécations envers Christopher qui se contenta de sortir une cigarette et de l’allumer.
« Mais oui, mais oui, chéri… Eblouis moi de ta sainte parole et rentrons... »
Ce fut la dernière réplique qu’il entendit d’eux cette nuit-là.
Je fais face à Christopher qui lit mes conclusions de la troisième nuit d’observation. Il semble parfaitement décontracté, comme la première fois. J’en suis resté au même registre pour ses supérieurs : leur jeu est dangereux mais peut-être, à force de désinvolture et de provocations, Christopher saurait faire cracher le morceau à Frêne. Clairement content de mon constat, il referme le dossier qu’il va emporter avec lui et me contemple. Il sent fort la cigarette, il sent aussi le roux, cette légère odeur iodé ne trompe pas.
« Donc, vous pensez que j’ai bien la situation en main ? Que je le gère bien ? »
« Effectivement, c’est ce que je pense. Bien sûr, sa haine ne sera jamais calmée mais elle peut être tempérée. Il n’est pas sans espoir, il faut juste qu’il apprenne à faire la part des choses. »
Christopher sourit encore plus, l’air encore plus satisfait par ma réponse. J’entrelace mes doigts sur mon genou gauche et je l’interroge :
« Etait-il prévu qu’on vous le retire ? »
« C’est l’idée oui. Frêne a un tel caractère, comme vous l’avez remarqué. Mes supérieurs restent persuadés que l’hypnose est le meilleur moyen mais je ne suis pas d’accord avec ce fait, comme vous l’avez constaté. Il est fier et honorable, je n’aimerai pas le voir brisé. »
« Même si c’est un ennemi capable de vous tuer ? »
« Encore plus pour ça. Combien de personnes peuvent dire qu’elles ont un adversaire à la hauteur ? »
« Le combat est quand même déséquilibré. »
Et de tant de façons différentes que je ne vois nullement l’intérêt de toutes les énoncer. Christopher doit bien en être conscient, c’est un vieux milicien. Je l’observe encore alors qu’il semble déjà prêt à partir. Il n’attend que mon autorisation. Que je ne donne pas, j’ai encore des choses à observer et je sais qu’il ne reviendra pas de sitôt.
« Vous êtes venu me voir parce que le psychologue de la Milice aurait été trop partial ? »
« Entre autres. Il n’aurait pas levé les fesses de son bureau comme vous pour voir de ses propres yeux. Il se serait contenté de vidéos ou d’entrevus. Or, avec la forte tête de Frêne, je sais qu’il n’aurait pas eu la même impression que vous. La même vision d’ensemble. »
J’hoche la tête tout en me demandant tout de même comment est ce fameux psychologue pour que tous les miliciens finissent par se retrouver chez moi. Je me lève enfin et Christopher me suit dans le mouvement. Je le raccompagne à la porte d’entrée du cabinet et nous nous serrons la main.
« Je reviendrai vous voir si j’ai besoin de vous. D’ici là, essayez d’apprendre à mieux espionner. »
« Chacun ses points forts, monsieur Weisstein. Je trouve que je ne m’en suis pas si mal tiré malgré l’incident d’hier. Et je doute que ma présence ait tant dérangé votre esclave. Il aura osé jusqu’au bout vous insulter. »
Christopher rigole comme si c’était vraiment une bonne blague. Je souris et il se détourne pour partir. Je le regarde faire, alors que le vent froid de Copenhague m’entoure et finalement, je ferme la porte quand il n’est plus dans mon champ de vision.
J’ai un autre rapport à écrire et il vaut mieux que je le fasse maintenant, que cette affaire soit enfin réglée une bonne fois. J’ai heureusement une petite heure pour ça… Enfin, je dis cela, mais la fin n’est pas écrite et j’espère qu’il y aura beaucoup de temps avant que cela soit fait. C’est le genre d’histoire qui mérite d’être lu, mais ce n’est que mon avis.
Épilogue
« Alors ? »
Frêne était allongé dans le canapé de Christopher, en train de savourer des crevettes thaï devant une émission débile. Il regarda le brun enlever sa veste et la pendre à la patère. Se passer une main dans les cheveux avant de se pencher pour retirer ses chaussures. Il se lécha les lèvres à cause de la sauce et dépose sa boîte de repas sur la table basse, à côté de son verre d’eau. Il essuya rapidement ses doigts et se leva pour se confronter au milicien toujours silencieux. Impatient de connaître le verdict. Il tira l’homme à lui sans douceur mais sans brutalité non plus que leurs yeux soient les uns dans les autres. Le sourire en coin de Christopher le fit sourire en retour, un tic qu’il commençait à avoir face à cet air trop joyeux pour lui.
« Alors tout est OK. Il y a cru, ses conclusions sont sans appel : je peux un jour te faire parler, il faut juste un peu de patience. »
Frêne éclata de rire en entendant cela. Pas moyen que Christopher lui soustrait le moindre mot au sujet de la résistance, qu’elle soit existante ou non. Il ne cesserait jamais de penser que les vampires devaient disparaître de la planète, bien qu’il soit prêt à faire quelques exceptions. Comme avec l’homme qu’il embrassait maintenant à pleine bouche, qu’il entraînait vers le canapé. Fier d’entendre le vampire gémir à cause de lui. Il ne savait pas s’il l’aimait ou non, le brun l’énervait réellement la plupart du temps. Mais il y avait cette entente entre eux. Ce lien. Il ne pouvait pas y déposer de définition mais il l’aimait bien. Ça devrait suffire, de sa part, non ?
Christopher semblait bien en prendre son parti en tout cas alors qu’il déshabillait Frêne sur le chemin, content de sentir ce pantalon en trop se faire la malle. Il tomba à plat dos sur le canapé et ouvrit les yeux pour contempler le spectacle d’un Frêne qui retirait son tee-shirt, offrant à sa vue sa peau si pâle et diaphane. Sans le quitter du regard, il retira ses propres vêtements en trop, pressé d’avoir plus. Il fallait dire qu’avant de le laisser partir, le roux ne lui avait pas laissé d’autres choix que d’avoir ce plug anal dans son conduit. Le vampire était plus que prêt à se faire défoncer. Même si en réalité, Frêne n’avait pas la force pour ça.
Frêne qui rejoignit sa proie sur le canapé pour un nouveau baiser. Son bleu avait déjà disparu, il fallait dire que Christopher n’avait pas cogné si fort la veille. Pour la plaie à la tempe, il avait dû se débrouiller seul. Attendre le psychologue dans le noir et le froid l’avait un peu soûlé mais ça en avait valu la peine. Sa chevelure rouge glissait les abdominaux de Christopher alors qu’il lui écartait les cuisses, les caressant à rebrousse-poil jusqu’à arriver à une zone qui commençait à être tendu.
« Et il n’a vraiment pas compris qu’on se jouait de lui ? »
Le roux se saisit de la quasi érection de son compagnon, le branlant lentement pour l’entendre haleter.
« N… Non… Ou il n’a rien… montré... »
Christopher se cambra pour avoir plus, aussi impatient que Frêne à présent. Il glissa sa main entre eux dans l’idée de retirer le plug mais le roux chassa cet appendice non bienvenu et claqua de la langue.
« C’est moi qui décide, vampire. Tu es mon jouet, tu t’en souviens ? En public, tu décides… Mais ici et maintenant, tu te laisses faire. »
C’était LA règle qu’ils avaient établi entre eux quand ils avaient remarqué le désir entre eux. Si du côté de Christopher, il avait aussi tenu de la curiosité, de la part de Frêne, il y avait toujours eu quelque chose de furieux avec. Si bien que c’était la raison pour laquelle il régnait une fois les portes fermées. Parce qu’au fond, Christopher aimait bien quand cela s’accompagnait d’un peu de violence. Aussi, sa main alla se saisir d’une partie de la chevelure rousse et il siffla.
« Arrête de me faire languir. J’étais déjà prêt avant de partir. »
« Je décide. Continue de me contrarier et ça va prendre encore plus de temps, ‘mon chéri’. »
Christopher abandonna donc l’idée de prendre un peu le dessus et savoura la langue de Frêne quand elle revint prendre possession de sa bouche, se cambra encore quand un pouce habile vint frotter son gland, cueillant par la même occasion une goutte de pré-sperme qui fut bien étalé, rendant le tout brillant à la lumière de la télévision. Il geignit tout bas quand Frêne mordit dans son cou, comme lui aimerait le faire aussi et il se laissa aller. Tout simplement.
Frêne adorait ce moment où Christopher rendait les armes pour qu’il puisse faire chanter son corps à sa guise. Il mordit de plus belle ce cou offert, pour y laisser une trace même éphémère. Il poussa ensuite le brun à se mettre à plat ventre et mit une claque sur ce fessier musclé et savoureux. Il en savait quelque chose. Déposant une pluie de morsures sur ce dos appétissant, le roux descendait peu à peu, sa main piégée sous le milicien toujours autour de son érection qu’il caressait presque nonchalamment. Les gémissements de Christopher lui faisaient savoir que ce n’était pas assez, bien au contraire. Mais Frêne était d’humeur à jouer, comme le brun avait pu jouer avec ses nerfs ces trois dernières nuits. Une juste vengeance.
Le guppy retira enfin le plug dans un bruit un peu obscène et contempla cette entrée avide dans laquelle il glissa son index. Christopher en émit un son indécent alors qu’il fouillait sans douceur l’intérieur toujours bien gluant grâce au lubrifiant. Mais ça ne serait pas assez pour qu’il puisse s’introduire sans se faire mal. Aussi, il se leva à nouveau, lâchant complètement le brun qui émit une plainte et se planta devant son visage, tenant son propre sexe.
« Suce. »
Christopher n’eut pas la moindre hésitation, engouffrant cette turgescence chaleureuse dans sa bouche. Il posa les mains sur les hanches du roux pour pouvoir faire glisser ce membre entre ses lèvres, les yeux à demi-clos pour bien savourer ce moment. Frêne ne le permettait pas si souvent, se méfiant sûrement de ses crocs. Pourtant, c’était bon de se faire réchauffer la gorge ainsi, de déglutir autour de cette longueur désirable. Il fit tourner sa langue autour du bout quand il le put, se retrouvant surtout à tout lécher du dessous comme les mouvements se faisaient plus saccadés. Le souffle plus court, Frêne s’arracha de cette fellation délicieuse, presque à sa limite.
« A quatre pattes. Tu vas l’avoir puisque tu le veux tellement, mon sexe. »
Christopher sourit en se léchant les lèvres et se mit en position sur son canapé. Frêne retourna derrière lui tout en s’ordonnant de se calmer. Il plongea deux doigts dans le corps du brun pour lui enlever ce sourire moqueur, tout de même, appuyant volontiers sur cette prostate qu’il savait très bien où trouver. Et sans prévenir, il le retira pour le pénétrer d’un seul coup. Il eut l’impression de sentir son érection vibrer dans ce tunnel serré. Il se mordit la lèvre pour ne pas jouir, empoigna les hanches de Christopher qui avait laissé entendre un léger cri à cette vive intrusion.
« Je vais jouir... »
« Non. Quand j’aurais décidé... »
Frêne asséna une claque sur une fesse pour faire valoir son avis sur a question et attendit encore un peu avant de bouger. Les spasmes de Christopher lui faisaient perdre toute mesure, il entendait son cœur battre dans ses oreilles, couvrant presque les bruits de son pubis frappant les fesses de Christopher, les gémissements outranciers du brun qui ne cachait pas son plaisir. Griffant les hanches de son amant, Frêne ne sut se retenir d’y aller plus brutalité, sans bien savoir pourquoi il éprouvait un tel besoin. L’extase était là finalement à quelques pas, ou plutôt quelques coups de reins bien placés. Il sentit Christopher se resserrait encore plus autour de lui, salir sa main qui avait tenu son organe tendu tout ce temps, accompagnant les mouvements à l’intérieur. Le roux se retira alors et se rendit à son tour sur le dos du brun, sur ses fesses et tomba assis dans le canapé, entouré par l’odeur de leur ébat.
Christopher mit un peu moins de temps pour se remettre du nirvana, à moitié allongé dans le canapé, les yeux sur Frêne. Il adorait le voir bousiller par l’orgasme, il considérait cela comme une vraie victoire personnelle. Qui pouvait se vanter d’avoir déjà vu le roux comme ça ? Pas beaucoup…
« Ne me dis pas que tu es déjà fatigué, mon chéri. Je serai triste. »
« Arrête de me parler comme ça, Chris. Ou tu vas la mettre la cage de chasteté. »
Frêne se leva, surplombant le brun de sa silhouette pâle, tout en muscle. Son tatouage rouge luisait étrangement dans cet éclairage. Il attrapa la télécommandé, éteignit le poste.
« Dans la chambre. »
Christopher se leva d’un bond pour rejoindre le lit. Parce qu’une fois ne serait jamais assez dans une nuit…
Sur Frêne Lowhel et Christopher Weisstein
Ils doivent penser que je n’ai pas compris leur manège et sur le moment, c’était bien le cas. Mais ils en ont trop fait et ils se sont tous seuls piégés. Je ne comprends pas bien pourquoi Christopher ne l’a pas évoqué à son supérieur. Serait-ce vu comme une trahison de coucher avec lui ?
En tout cas, je sais que je les ai couverts et qu’actuellement, je permets à deux ennemis de profiter du plaisir d’être dans les bras l’un de l’autre. Était-ce la bonne chose à faire ? Peut-être, si l’on veut qu’un jour, Frêne Lowhel ne détruise pas tous les vampires si l’occasion lui parvient.
Au fond, tout le monde mérite un peu de bonheur. Certes, Frêne ne sera jamais pleinement heureux sous le régime vampire, mais on peut l’aider à s’en accommoder comme Christopher lui en laisse justement l’occasion en donnant de sa personne. Au sens propre du terme.
Je ne pense pas qu’ils soient amoureux. Mais le désir se montre sous tant de formes différentes que je ne saurais leur jeter la pierre. Après tout, c’est eux qui prennent tous les risques. Et le jeu est intéressant même si la fin peut être la mort. Ils en ont conscience, c’est leur choix et je ne suis pas là pour juger, comme je le dis toujours.
Ils m’auront tout de même bien amusé avec leurs disputes ridicules.
Qu’ils vivent leurs bons moments.
Notes codées de Taivas Eriksson
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