Stella Cinis
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Une vaste pandémie frappe l’humanité au cours de l’an 2000. Fléau divin, raté biologique ou simple régulation naturelle, l’origine du virus “Necrosis” est inconnue. Plus virulant que la peste bubonique, Necrosis tue en quelques jours ses hôtes, à grands renforts de fièvres, de vomissements et de nécroses des tissus sensibles (muqueuses) ainsi que de plaies. En quelques mois, la population mondiale chute de plus de moitié, ouvrant une immense brèche pour la race vampire, demeurée jusqu’alors tapie dans l’ombre.
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Kornel Belnades
Messages : 123
Métier : Artiste
L’Iconoclaste
Kornel Belnades
L’Iconoclaste


Prénom(s) : Florían ;
Nom(s) : Nemes ;
Surnom(s) : Kornel Belnades ;
Âge : 530 ans ;
Âge apparent : 27 ans ;
Nationalité : Hongroise ;
Race : -
Standing : Riche ; 
Orientation : Scopophile ;
Métier : Artiste peintre-photographe ;
Autre : Accent hongrois persistant et tendance à la mysophobie.  


Kornel Belnades



    » De la merde. Voilà ce que pense Kornel Belnades de la société actuelle et de l’esclavage. Ah ! Mais ! Il a toujours pensé de travers, l’artiste. Et la merde, c’est très exactement l’état dans lequel il se sent être. Ça tombe bien, non ? Ah ! Mais, lui, contrairement à la société actuelle, il a des manies pour se garder bien propre. Au moins en apparences.

Alors, il est bien dans la société actuelle. Il en profite bien : belle maison, belle voiture, excentricité, excès, on achète, on vend, on s’en fout, qu’est-ce que c’est bien la merde et qu’est-ce qu’on aime être dedans pourvu qu’on puisse se laver les mains quarante fois avant et après. Ça lui évite d’avoir à se poser des questions, ce petit rythme de vie bien orchestré depuis des siècles. Il a déjà vu le monde : il peut fermer les yeux. Il connaît tout : il peut ignorer ce qu’il veut. Belnades, parce qu’il est Belnades croit qu’il n’a de compte à rendre à personne, et surtout pas à l’humanité toute entière - AH ! L’HUMANITÉ ! HA ! Il va pleurer de rire : ça n’a jamais existé, ça, l’hu-ma-ni-té.

Alors, il est bien avec l’esclavage. Il en profite bien : beau corps, belle personnalité, sauvage, docile, on achète, on abandonne, on s’en fout, c’est le coup de foudre et c’est emmerdant les besoins des autres et les responsabilités. Ça s’interdit rien au nom de l’Art, de la Passion perdue ; ça croit la retrouver dans les magasins, dans les parcs, partout. Mais ça la perd à la seconde même où ça réalise qu’un être vivant, c’est vivant et que ça doit vivre.

De la merde, donc. Mais Belnades en a dans les yeux depuis très longtemps. On dirait que rien n’est assez bien pour lui. Même pas lui-même.






Avatar venant de NEGSHIN, OC



IMPRESSIONISM


« Flauriian, tou rèssémbles àn tan graande-mèr’. »

Ces mots furent l’énigmatique qualification qui berça jamais l’adolescence de Kornel Belnades, ou Florían Nemes de son vrai nom. Quelque part, certainement, ils furent également ceux qui l’incitèrent à entretenir ce minutieux sens du perfectionnisme esthétique qui le caractérise, pense-t-il, alors qu’il nous parle de sa vieille vie en se la remémorant parfaitement. Comme si elles avaient été prononcées hier, il cite ces paroles avec un accent renforcé et, comme jadis pourtant ajoute-t-il aussitôt, il peine encore à les trouver sensées : « Comment donc pouvais-je ressembler à une vieille femme humaine, que je ne connus jamais autrement que peinte sur un tableau à taille réelle, âgée autant qu’elle avait pu l’être, alors que j’étais à peine entré dans la jeunesse, et masculin de surcroît, en comparaison de cette croûte n’excédant que d’une traditionnelle laideur paysanne ? »

Souvent, nous raconte-t-il, il contempla l’œuvre grotesque, y cherchant ses traits dans les lignes et les couleurs pauvres de ce portrait, qu’il garde pourtant accroché chez lui. Bien que jamais il n’eut la « malchance » de trouver quelconque élément à rapprocher de sa propre personne parmi cette « pochade », il avoue admirer encore profondément la toile et se demander finalement si, avec l’âge, il n’aurait effectivement pas dû finir par lui ressembler. « Contempler cette horreur, dit-il, c’est un peu comme contempler ce que la nature n’aura jamais le temps de me faire. C’est apaisant. »

Et en effet, quand il nous montre ses propres clichés d’antan, remontant jusqu’en 1987, l’année de ses dix-sept ans, l’on constate que la vieillesse n’a fait qu’assombrir ses cheveux sombres et confirmer les angles nets de son visage ; la noblesse de sa mâchoire et la puissance de son cou sont certainement éternelles et l’élégance de ses lèvres charnues, apparemment depuis toujours naturellement carminées, impossible à ravir. Tout en sortant ces prises de ses cartons, il s’étonne presque en se redécouvrant tel qu’il est pourtant, et sourit joliment, semble-t-il rassuré à l’idée de ne jamais voir sa taille se rabougrir plus qu’elle ne l’est déjà, avec « à peine » cent-soixante-dix-huit centimètres de grandeur, apparemment grêle, mais « encore trop gros » à ses yeux. En une époque, nous confie-t-il, il s’amusait à se représenter vieux, gros, maigre, barbu et déchevelé, la plupart du temps pour apprécier plus fortement son inaltérable écrin de chair sculpté.

Car Florían Nemes mourut jeune, soit dans l’année de ses 27 ans, et jamais réellement la nature n’a eu le temps de le faire dépérir et souffrir de ces odieux sévices qu’elle offrit à sa grand-mère. Bien que toujours et absolument habillé de pied en cap, avec un de ses fameux chapeaux sur le sommet de la tête, il nous assure qu’il ne possède aucune difformité ni aucune monstrueuse irrégularité semblables à celles de cette vieille femme peinte : pas d’abominables tatouages, pas de grain de beauté mal-formé, pas de ride, pas de tâche de vin, pas de veinules éclatées ni d’os plus saillant que les autres sous sa peau albescente, voilà quelques-unes de « ces répugnances » qu’il nous liste, avec un dégoût certain, et le soulagement, donc, de ne pas avoir à les compter sur lui.

La mort de l’Artiste  1523532755-carathayer-apertural

Pourtant, lorsqu’on lui demande s’il a un jour posé comme Dalma Nemesné avant lui, et s’il accepterait de le faire pour nous, il se fige sur place et cache « l’imperfection géométrique » de son visage derrière sa main. Son « non » est spontané et agressif ; ses yeux gris en amande, cernés tout de même par ses très jeunes années d’asthénie et de fatigue nous a-t-il expliqué, nous regardent en cherchant déjà un moyen de fuir. Les raisons pleuvent alors pour qu’il n’ait pas à se montrer de l’autre côté de l’objectif, révélant en fait une extrême pudeur et la crainte plus grande encore de se voir lui-même en photo aujourd’hui. « Vous voyez, l’appareil, ce n’est qu’un moyen de retrouver la myopie humaine. Vous la prendriez et vous la trouveriez certainement excellente, mais elle serait horriblement fausse et imparfaite, parce que les yeux humains sont dégénérés. Je serai excellent en photo, sûrement, alors que je ne le suis pas quand je me regarde dans un miroir. À quoi bon, alors… ? Les gens n’ont pas besoin qu’on leur mente… Ce serait sale. Nos yeux sont sales. Tout l’est. »
 


EXPRESSIONISM


« La Nature est sale par nature, mais tout le monde ne le voit pas. »


« Dégoûtant » et « sale » ne sont que quelques-uns des mots qui reviennent régulièrement dans la bouche de l’artiste pour décrire sa vision du monde. « C’est horrible tout ce que je peux percevoir que je ne voyais pas avant. (…) Avant, je n’avais pas de problème. Mais maintenant, aller prendre un bain Széchényi me paraît être l’idée la plus folle de l’univers... Et boire dans un verre que je n’ai pas nettoyé moi-même aussi... Et... Je crois que vous vous en rendez pas compte... tout est vraiment... trop... grouillants... partout ! »

Tout en essayant d’expliquer d’où lui vient cette obsession délirante pour la présence de germes, de parasites et de protistes, il se camoufle les mains dans ses manches et frotte a priori machinalement l’accoudoir de son siège. Malgré l’aspect visiblement aseptisé de son appartement, et de vaines tentatives pour le rassurer, assez vite il se referme sur lui-même alors qu’il semblait naturellement à l’aise, serein, socialement confiant et devient en fait ingérable. De nouveau, nous dit-il comme au bord d’une transe, la voix changée et son affolement difficilement répressible, avec un ton commun à la défensive, il ressent le besoin de nettoyer, déplacer et vérifier son espace. Ce qui nous semble être des crises, dit-il lorsque la présente se termine après quarante-cinq minutes de nettoyage compulsif, durant lequel il paraît apparemment ne rien entendre de ce qu’on peut lui dire, ces crises, donc, n’en sont pas d’après lui tant ses pulsions sont en fait « franchement maîtrisées et moins déraisonnables qu’avant. »

Afin de nous faire comprendre ce que sont ces « perceptions » qui le dérangent, et ces « besoins irrépressibles » qui transforment complètement sa personnalité, jusqu’à en faire un maniaque toqué s’il ne peut pas les assouvir, ou le rendre agressif s’il est gêné lors de la réalisation de son ménage, il remet la main sur l’une de ses premières œuvres en tant que nocturne, laquelle s’avère également être l’une des dernières de sa carrière de peintre renommé. Il s’agit de Legyen kívánságod szerint [Que ton désir soit exhaussé], un tableau réalisé en 1997 et racheté à son propriétaire en 2286, explique-t-il, redevenu parfaitement tranquille.  « J’ai commencé cette œuvre à l’Université et l’ai continuée bien après. Au début, je voulais m’en débarrasser car elle représente Illès Belnades. Je l’ai commencé en tant qu’être sale, humain je veux dire, et je pensais sincèrement qu’il serait un chef-d’œuvre, comme je croyais y mettre tout ce qu’un tableau peut contenir d’extraordinaire, grâce à Illès. Puis, lorsque je suis devenu Vampire, je l’ai corrigé, parce que le magnifique Illès Belnades que je voyais la veille était en fait banal au milieu d’un paysage abject (…). »

La mort de l’Artiste  1523531891-zsolt-bodoni-hjj

Racontant comment la bonification de ses sens a finalement perturbé et paupérisé ses sources d’inspirations les unes après les autres, il se décrit en artiste écrasé par sa quête d’un « perfectionnisme symbolique », qui lui aura valu « le sacrifice de sa vie », et la redécouverte du monde avec ses « yeux justes ». La photographie, résume-t-il, s’est offerte à lui après ce « terrible dévoilement », ainsi appelle-t-il sa transformation, comme un moyen de recouvrer la vue dégradée et plus supportable des hommes. « À présent, je ne le fais plus [peindre] que rarement, et seulement pour des choses abstraites... l’odeur me dérange aussi... c’est d’ailleurs la première chose qui m’a dérangé. L’odeur des animaux, surtout. Et les bruits qu’ils font aussi. En se déplaçant. Ou en se léchant... Tout m’a dérangé... »

Certainement, il fut difficile pour Florían Nemes de devenir Kornel Belnades, considérant que le vampire qui le transforma ne prit pas soin de le familiariser convenablement avec l’excellence de sa nouvelle condition. « J’ai vomi tout ce qu’il était possible de vomir : des odeurs, des bruits, des goûts, des touchers... tout, tout a fini par me répugner et aujourd’hui... Non... non, aujourd’hui, ça va mieux, quand même... Juste... les animaux. C’est pas possible. Non. Non. Ils sont dégoûtants. Et sales. Putain ce qu’ils sont sales... »    

Hypersensible, donc, Kornel Belnades est un artiste qui l’est assurément et, bien que devenu photographe par la force des choses, il refuse d’abandonner les orientations romantiques de son art, qu’il se targue de pouvoir qualifier comme la « quintessence de ce qu’est la vie : parfaitement dérangeant ».


SURREALISM



L’Œil Dégénéré

Si de nombreuses études se sont intéressées à la vie de Florían Nemes afin de comprendre la portée de ses œuvres, et plus globalement les origines du mouvement artistique dont il est le fondateur (L’Œil Dégénéré, 1997), peu d’entre elles ont su mettre en lumière les inspirations du peintre avant qu’il ne disparaisse de la scène artistique. À ce jour, seul le roman de Mihály Diop, auteur Croate, semble cerner le vécu du personnage et l’évolution de son art.

Bien que tout d’abord présentée comme fictive, l’œuvre World Collide (2039) s’attache à décrire avec précision le bouleversement de quelques hommes changés en vampires. Diop, notamment connu pour avoir retracé l’histoire des créatures de leur émergence à leur assise au sommet du monde, voue sa carrière à l’étude de ces transformations et de leurs impacts psychologiques. Plus tard, il avouera avoir prêté sa vie au personnage de Philippe, romancier en quête de réponses sur les origines de ses dons.

Comme Mihály Diop assiste régulièrement aux expositions au travers le monde de Luminous Bodies walking on the Blue Danube (2001), œuvre majeure et classée de Florían Nemes, l’amitié existante entre les deux vampires semble pouvoir être rapprochée de celle entre Philippe et le peintre Adrien, qu’il rencontre au cour d’une chasse géante à l’homme, sur les terres hongroises. Florían Nemes ayant réalisé son tableau monumental lors de la prise du pays, la représentant également, cette interprétation paraît être la plus juste, bien qu’elle n’ait jamais été confirmée ou infirmée ni par Diop ni par Nemes.

Dans le roman, Adrien est d'abord présenté comme un très jeune vampire au fort accent hongrois, maîtrisant mal ses dons, obsédé par la vision et le dessin des êtres malades ou capturés qu’il rencontre.

 (…) Comme habité par la crainte de ne pas avoir le temps de les achever, il gribouillait ces choses dans son journal a une vitesse incroyable, et jurait en hongrois chaque fois que son empressement lui faisait perdre son feutre au travers de ses pages. Cela faisait trois ans qu'il était Nous, et toutefois il semblait encore mal maîtriser Nos prouesses, désormais également siennes. Avec une certaine panique dans ses yeux opaques reflétant la lumière de la lune, il observait ce corps féminin muselé devant nous, à l'affût, grattant obstinément la minuscule strie qui embrassait sa lèvre supérieure avant de reprendre ou de recommencer ses estampes maladives. Je réalisai que, comme moi, il s'était engagé dans cette révolution totale pour faire l'expérience d'une guerre autrement plus oisive et noble que celles jamais racontées par l'Histoire humaine, et avec le même attrait morbide pour ce qui est nouveau et ce qui est dangereusement susceptible de virer fatidiquement l'essence de ce qu'on ose appeler Art.

Peu bavard, son degré d'implication dans la rafle reste vague. De son côté, Florían Nemes n’évoque que très figurativement sa participation à la conquête lorsqu’il présente son tableau pour la première fois, préférant laisser au public et aux experts le loisir d’en saisir la profondeur changeante et subjective. Néanmoins, sa disparition du monde artistique et les accords passés concernant l’exposition définitive de son œuvre au Musée du Patrimoine International correspondent avec la retraite de plus de trois siècles que prend Adrien et les hantises qui l’accablent.

À Siófok, où il s’enferme dans la maison de ses parents, Adrien mène une vie décousue et déconnectée. Lorsque Philippe lui rend visite pour la première fois depuis la fin de leurs voyages, il le reconnaît à peine. Le vampire est affamé et seul. Son logement est à l’état d’abandon depuis des années, devenu sordide et inhabitable suite à la disparition de son esclave. Adrien montrant déjà des signes de manies, plus ou moins identiques à ceux de Nemes lors de la fin de la conquête, ce passage du roman suggère une perte de contrôle, sinon une décompensation de l’artiste qui peuvent justifier sa remise en question artistique et son choix de changer de support, comme il l’explique lors de la présentation de son nouveau projet photographique.

La photographie s’est imposée à moi. C’est un support plus lisse, plus agréable à saisir dans la durée comme dans l’instantané. Ce que l’on voit dans une photo n’est pas uniquement ce que l’on souhaite tout de suite capturer. C’est soit exactement ce que l’on souhaite voir, pour toujours, soit exactement ce que l’on n’a pas vu, ni au moment, ni jamais. Ça transforme nos yeux, mais pas uniquement nos yeux : le regard, aussi.

Ce projet, Nemes le décrit comme une nouvelle forme d’optique : il s’attache à saisir des yeux extraordinaires, soit de part l’intensité qu’ils dégagent soit de part leurs caractéristiques purement physiques. Afin de réaliser son projet de recensement de pupilles, le peintre-photographe s’engage d’abord à parcourir les centres, villes et pays avant de poser ses valises à Copenhague, où il se sédentarise et crée finalement son studio photo. Dès lors, il ne va plus que rarement vers les sujets qui l’intéressent, préférant les faire venir à lui, quitte à acheter chèrement des esclaves pour en avoir l’entière exclusivité.

Dans cette méthodologie, que Nemes revendique pour être classique et tout à fait pertinente, on reconnaît celle qu’utilise Adrien de son vivant pour s’assurer de garder sa Muse près de lui.

Il [la Muse] ne voulait pas rester. Je l’ennuyais. On ne se voyait que la nuit, alors les nuits étaient très courtes et les jours très longs. Lorsqu’il était là, je voulais tout faire : le regarder, le dessiner, l’écouter. Je voulais qu’il me parle longtemps, beaucoup, pour voir comment ses lèvres bougent, pour savoir quelles teintes utiliser pour peindre sa voix. Je voulais tout faire, alors je ne faisais rien. Les nuits étaient trop courtes ! ... Mais pour lui elles étaient très longues. De l’ennui ! Il s’ennuyait ! Moi, je m’ennuyais de lui ! Quand il n’était pas là, je ne voulais rien faire ! Je pensais à lui - on me prenait pour un fou, aux Beaux-Arts ! J’avais un modèle que personne ne voyait ; je jurais que j’en ferai un chef-d’œuvre et qu’ils n’en reviendraient pas. Je ne faisais que ça : lui. Je ne faisais que lui, je ne voulais faire que lui. Rien d’autre. Qu’est-ce que j’ai fait d’autre, Philippe ? Rien. Ils ont craché sur son portrait comme ils m’ont craché dessus quand je suis arrivé à Budapest. C’est ce qu’ils ont fait ! Et moi – moi ! – j’ai juré que j’en ferai un chef-d’œuvre, l’unique chef-d’œuvre de ma vie. “Il n’y en aura pas d’autre !” je disais, quand il voulait me calmer. “Dessine des fruits.” DES FRUITS ! QUI VEUT DESSINER DES FRUITS !? Je déteste les fruits ! Mon premier dessin, Philippe, ç’a été les foules nues à Balaton ! J’avais quatorze ans ! Je n’étais jamais sorti de chez moi ! Je l’ai fait pour ça ! MAIS DES FRUITS, PHILIPPE ! Est-ce que j’ai une tête à peindre des fruits ?! NON ! Et ce connard – ce connard ! –, il voulait que je dessine des fruits parce qu’il s’ennuyait ! ... Je les lui ai fait manger, ses fruits. Je me suis endetté pour ça, tu te rends compte ? Je vivais dans ma merde, dans un sous-sol, et je lui achetais des fruits pour le regarder les manger, dans un appartement que je ne me suis pas offert à moi-même… Ce petit bâtard… Qu’est-ce que j’ai voulu qu’il reste… Ça m’a tué, Philippe… Mais c'est aussi uniquement grâce à lui que je suis encore vivant…

L’histoire d’Adrien prend fin lorsqu’il accepte, finalement, de se séparer du portrait de son modèle, qui se révèle également être son créateur. Il brûle également ses pinceaux et ses toiles, avec l’aide de Philippe, à qui il jure qu’il ne peindra plus jamais, trop déçu, trop désabusé qu’il se dit être parce qu’il a fait.
Adrien se rend compte qu’il n’est pas capable de supporter le vide, atemporel, qu’être immortel implique, autant qu’il ne supporte pas la vérité de ce monde, qu’il estime désormais fade, que lui font voir ses sens.

Je pourrais me crever les yeux toutes les nuits : ils repousseront. Je pourrais m’entourer d’une quantité de choses qui me plaisent : je verrai tous leurs défauts au fil du temps. J’en sentirais toujours l’odeur et le goût qui changent, que je m’étouffe ou que je m’étrangle. Je pourrais me râper la peau, m’arracher tous les nerfs chaque matin : ils repousseront. Bien sûr, rester végétatif me calmera quelques heures, et puis il y aura la faim, et tout reviendra. Il n’y a rien à faire, Philippe. Les choses sont ce qu’elles sont. Je pourrais m’inventer une nouvelle vie ! L’enrichir de rituels qui m’empêcheront de voir, de sentir, de goûter, d’entendre, de toucher… ! Je pourrais recommencer incessament pour ne pas penser à sauter par la fenêtre lorsque le jour se lève. Pour oublier, comme ma mère a oublié. Je pourrais, mais ma tête restera ma tête, comme ma mère est restée ma mère. Si je ne peux plus peindre, je ne peux plus vivre ! Alors je suis mort. Définitivement. Mais qui peut le voir, Philippe, maintenant que tout le monde peut très bien voir ce que sont les choses, et que plus personne ne les regarde ? À quoi bon montrer ? À quoi bon peindre ? Tout est là, et moi, petit, je ne voulais déjà pas de ce tout-là.

S’il est avéré que Nemes a bel et bien peint le portrait de son créateur (Legyen kívánságod szerint, 1997), ce dernier n’est exposé qu’en 2027, en même temps que Luminous Bodies Walking on the Blue Danube (2001). Bien que l'intérêt de cette double exposition n’ait pas été de mettre les œuvres en concurrence, le succès du tableau monumental éclipse entièrement le portrait de part sa technicité innovante et le polymorphisme de ce qui peut y être vu. La déception d’Adrien, ce sentiment d’échec et de décalage dont il fait part à Philippe peuvent être les raisons pour lesquelles Nemes vend le portrait en 2030, avant de le racheter à son propriétaire en 2286. Il n’est cependant plus jamais exposé et l’artiste ne peint plus.

Jusqu’à ce jour, Florían Nemes n’expose que périodiquement quelques-unes de ses photographies dans les petites galeries qu’il sélectionne. On retrouve dans ces dernières les influences parfois surréalistes, impressionistes et expressionistes du peintre qui tarde à terminer son projet.


Mer 11 Avr - 13:40 Kornel Belnades
Anonymous
Invité
Invité

Félicitations, tu es VALIDÉ ♥️ par Drake et moi-même !


Aaaah Kornel Kornel Kornel... ~ <3 Toi tu es comme Ivo, je te lorgne dessus depuis que j'ai zieuté ta plume et tes persos, mais il faudra certainement quelques mois supplémentaires (ou années ? ou peut-être jamais haha !) avant qu'on écrive un truc ensemble ! Kornel, un concept juste délicieusement zinzin.
Allez, file faire plein de petits RPs, j'attends impatiemment celui tout en nuances de doré ~

Tu peux dès à présent remplir ou mettre à jour ta fiche de joueur, et ensuite, recenser ton personnage !


Ensuite, n'hésite pas si tu as envie à :



Amuse toi bien sur le forum ♥️

Dim 15 Avr - 10:29 Invité
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